• 6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms

    De Cepoy (Loiret) à Villejuif (Val-de-Marne).

    Difficile de me lever ce matin. La nuit a été mouvementée, entre bruit des voitures, concert des grenouilles, froid et bruit divers. J'ai su par mon voisin que les bruits divers étaient ceux d'un groupe de campeurs et campeuses revenant d'un mariage bien arrosé.  Départ à 9h30. La veille, j'ai préparé et noté sur papier le trajet d'aujourd'hui. Des petites départementales jusqu'à Ponthierry-Saint-Fargeau. Une sorte de légère diagonale qui permettra d'éviter les grands axes routiers. Peu de temps après mon départ j'aperçois l'Eurovéloroute La scandibérique (deTrondheim - Norvège - à Saint-Jacques-de-Compostelle - Espagne). J'aurais pu en faire une partie mais je souhaite faire au plus court. La journée va être suffisamment longue comme cela pour ne pas ajouter des kilomètres supplémentaires qui deviendraient très pénibles en fin de journée. Je ne regrette pas mon choix car les petites départementales empruntées sont calmes. Je me surprends à être relaxe (Relax don't do it !). 

    J'estime à 120 le nombre de kilomètres à parcourir pour rentrer chez moi. On verra ce qu'indiquera le compteur à mon retour. A Château-London, ville située dans le sud de la Seine-et-Marne, à la limite du Loiret (et oui, changement de département, changement de région !) je suis témoin d'une altercation. En train de regarder mon plan sur un trottoir, j'entends deux personnes se disputer bruyamment. Un automobiliste n'a pas indiqué son intention de tourner, un cycliste a failli tomber. L'automobiliste descend de sa voiture brusquement en criant et en montrant ses poings à son interlocuteur. L'automobiliste ne veut pas reconnaître ses tords et au contraire attaque verbalement le cycliste. Je suis stupéfaite de la manière dont certains hommes, malheureusement pas des exceptions, ont la capacité à montrer leur force à la moindre occasion : "je suis le plus fort, ferme ta gueule ou sinon,  viens te battre !" C'est ainsi que tout petit ils intègrent qu'en étant des garçons puis des hommes, ils doivent être forts, très forts. Ne pas montrer leurs "faiblesses" (à leurs yeux), être virils sous peine de moqueries. Des stéréotypes intégrés dès le plus jeune âge. Les hommes forts, virils, intelligents et les femmes douces, gentilles, dévouées, belles. Les adjectifs sont bien sûr non exhaustifs et plus ou moins variables mais la société, l'éducation, la construction en tant qu'individu-e-s font des différences dès la naissance et même pendant la grossesse. Chaque individu-e se sentant dans l'obligation de suivre un chemin dicté par des stéréotypes. La transgression est rarement facile pour celles et ceux refusant de se conformer aux modèles. Le ton monte, je me sens obligée d'intervenir d'autant plus que tous les deux sont à ma hauteur. Je précise à l'automobiliste que le cycliste risquait gros s'il était rentré en collision avec la voiture. Il aurait pu aller à l'hôpital. Il me répond : "Oui, mais qu'est-ce qui me serait arrivé à moi" (en pensant à la justice, aux assurances)" Mais on ne peut pas inverser les rôles. Pensez juste la prochaine fois à mettre votre clignotant". "Oui, j'essaierai d'y penser" et il est monté dans sa voiture pour repartir. Le cycliste en a fait de même. Ouf, mais la situation a été vraiment limite ou comment attaquer pour ne pas avoir à remettre en question ses tords. Tout le monde fait des erreurs, ce n'est pas toujours facile de l'admettre, j'en suis certaine et l'altercation en a été malheureusement le bon exemple. Château-Landon est petite ville de 3.000 habitant-e-s tout en hauteur avec une superbe vue des environs (voir photo 1 et 2).

    Passage dans la forêt de Fontainebleau, par l'ouest, le massif des 3 pignons. Je ne me suis malheureusement pas arrêtée, ne serait-ce que quelques instants. J'ai apprécié de pédaler sur une petite départementale boisée, le coin est agréable et me donne envie d'y retourner. Je suis dans le parc naturel régional du Gatinais français et y partir un week-end serait une très bonne idée. Un prochain projet à mettre en place et j'en suis toute enthousiaste. Je fais une pause déjeuner dans un parc de Saint-Martin-en-Brière. Il est 15 heures et j'ai approximativement parcouru la moitié du trajet d'aujourd'hui. Je continue sur des petites départementales jusqu'à Fargeau-Ponthierry.

    En pleine descente j'aperçois deux chevreuils en train de courir dans les champs. Je m'arrête en regardant auparavant dans mon rétroviseur si une voiture est située derrière moi, ce qui est le cas. Les deux chevreuils courent, sautent, une totale liberté qui me donnent des frissons. Un spectacle magnifique, j'en ai les larmes aux yeux. Les deux repartent en direction de la forêt qui est juste derrière les champs. Ils ont dû me voir ou la voiture derrière moi. Je continue à les regarder partir jusqu'à ne plus pouvoir les voir. Je ne veux pas louper une seule fraction de seconde de leur présence. La voiture se met à ma hauteur et l'automobiliste me dit en souriant : "Vous leur avez fait peur avec votre vélo" et je réponds : "Vous les avez vus ? C'est vraiment génial !". Oui, c'est formidable, je ne suis pas prête d'oublier ce moment magique, très fort et intense. Un souvenir très agréable que je mettrai entre parenthèse durant les 50 derniers kilomètres tant le parcours a été chaotique. Ce qui me semblait être le plus facile parce que déjà fait un certain nombre de fois, sera finalement le plus désagréable de la journée.

    A partir de Fargeau-Ponthierry la circulation est très dense. Ayant pédalé sur des petites départementales, j'ai du mal à m'acclimater aux bruits, aux voitures omniprésentes. Enormément de circulation, d'agressivité, de voitures partant en trombe. Un bruit et une ambiance insupportables. Mais où va tout ce monde un dimanche  en fin d'après-midi et début de soirée ? Départ en vacances, retour de vacances et week-end ? Je suis sans explications. Un automobiliste me frôle (à quelques centimètres près), certainement parce que je n'allais pas assez vite dans une montée. Frôler, faire peur, éventuellement provoquer un accident pour gagner quelques secondes. Un autre automobiliste me klaxonne à de multiple reprises, fait des appels de phare. Lorsque je le vois au prochain feu rouge, je lui demande ce qu'il s'est passé. Il me répond : "Je ne vous avez pas vue. Je vous ai vue au dernier moment. Pourquoi étiez-vous au milieu de la route" - "Parce que je tournais à gauche. Lorsque vous tournez à gauche, vous vous mettez bien au milieu, non ?". - "Vous auriez pu aller sur le trottoir." -"Les trottoirs sont fait pour les piétons, pas les cyclistes. Si vous ne rouliez pas aussi vite, vous m'auriez vue." - "Ah oui, d'accord madame. " - "Bonne soirée." -"Bonne soirée aussi." Et là, c'était très soft. Les deux parties s'expriment, s'écoutent et essaient de se comprendre, ce qui n'est pas toujours le cas. Je n'ai plus qu'une seule chose en tête : rentrer vite, vite, vite mais la fatigue se fait sentir. Mes jambes sont lourdes malgré l'énergie toujours palpable en moi. Au delà de la fatigue, un certain ras-le-bol de cette circulation toujours aussi importante. Enfin, la Seine apparaît à mes yeux, signe d'arrivée prochaine et aussi parce que j'aime la voir et aussi tous les fleuves, rivières, lacs, étangs, cours d'eau. Voir autre choses que ces routes jonchées de voitures bruyantes et potentiellement dangereuses. Marre de ces politiques qui ont fait de la voiture un élément central et indispensable à la vie en société. Aller à l'école, faire des études, travailler, se marier, avoir des enfants, posséder une voiture et mille autres choses, voter (dans le sens déléguer son pouvoir à des professionnel-le-s de la politique), avoir des loisirs clef en main, devenir grand-parent et perpétuer à l'infini ce cercle étant résolument admis comme celui de la Réussite avec un grand R. Un schéma à ne pas remettre en question sous prétexte de trahison aux grands principes fondamentaux. Je me calme.

    Il ne me reste plus que quelques kilomètres pour accéder au bonheur ! Il reste la côte interminable, lorsque l'on est fatiguée et chargée, près de chez moi. Les derniers efforts. Pédale après coup de pédale, j'avance et j'avancerai jusqu'au bout. Ma vie n'en dépend pas mais je garde en tête l'objectif fixé. Plus que quelques centaines de mètres. Oui, j'y suis, presque ! J'ouvre la porte d'entrée de mon immeuble. Ca y est, je suis arrivée. 132 kilomètres, il est 21 heures. Je monte les 4 étages en portant dans chaque main une sacoche arrière, la sacoche de guidon en bandoulière et la tente avec quelques doigts disponibles. C'est lourd mais je n'ai pas le courage de redescendre et remonter. J'ouvre la porte. Ma chatte m'attend derrière la porte et m'accueille chaleureusement.. Elle me fait la fête à sa manière. Je l'ai fait ! Oui !

     

     - Introduction

    1ère journée : mardi 6 juillet 2021

    2ème journée : mercredi 7 juillet 2021

    3ème journée : jeudi 8 juillet 2021

    4ème journée : vendredi 9 juillet 2021

    5ème journée : samedi 10 juillet 2021

    6ème journée : dimanche 11 juillet 2021

    Vidéo du voyage

     

    6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms

    6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms

    6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms

    6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms

    6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms

    6ème et dernière journée : dimanche 11 juillet 2021 - 132 kms


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :